La gratitude en entreprise, ce n'est pas ringard !
Gratitude : le mot semble presque ringard, comme une vieille coutume usagée qui dort désormais au fond d'un tiroir avec d’autres codes dépassés.
Et pourtant, la vogue de la psychologie positive l’a remise à l’honneur. Et depuis dix ans de nombreux chercheurs se sont penchés sur ses bienfaits. La gratitude fait même son entrée dans les entreprises. Est-ce une nouvelle mode, dans le sillage du vaste thème du « bien-être au travail » ? Ou bien y a-t-il là une voie sérieuse pour transformer un monde du travail qui a bien besoin de mutations profondes ?
Pourquoi la gratitude est révolutionnaire
Si la gratitude gratouille les cerveaux des chercheurs, c’est bien qu’il y a là un sujet qui vaut la peine d’être exploré. Néanmoins, les études scientifiques relatives aux applications de la gratitude au monde du travail restent limitées. Les résultats publiés jusqu’à présent montrent une augmentation des émotions positives, une diminution du stress et des problèmes de santé, un sentiment accru de notre capacité à atteindre nos objectifs, une plus grande satisfaction au travail. Si dire « merci » dans le monde de la performance du travail peut sembler saugrenu, de plus en plus d’entreprises, encouragées par les résultats de la recherche, s’y essaient. Et certaines expériences suggèrent de réelles transformations, reposant sur des connexions plus profondes, entre les collaborateurs, et avec le travail lui-même.
De quoi parle-t-on ? La gratitude se distingue de la simple appréciation. L’appréciation consiste à reconnaître les choses positives dans nos vies : nos relations, notre situation, les événements… La gratitude nous emmène un pas plus loin : elle nous invite à prendre conscience que ces éléments positifs sont souvent dus à des forces extérieures à nous-même, et notamment souvent dus aux autres. Cette définition éclaire bien pourquoi, dans l’entreprise, la gratitude n’a pas spontanément sa place. Dans un univers perçu comme un champ de compétition, il est difficile de reconnaître que l’on dépend des autres, et que nos succès sont aussi les leurs. En outre, comme nous sommes censés être « professionnels », introduire la gratitude, la pardon ou la compassion semble vraiment « hors-sujet ».
Néanmoins, certaines entreprises ont l’audace de promouvoir la gratitude. Ce dont elles témoignent, c’est plus de bien-être, d’engagement et de performance. Mais si c’est là l’intention première, il y a fort à parier que cela ne marchera pas. Les collaborateurs sentent bien, alors, qu’ils sont manipulés. Cela peut même avoir des effets pervers. Introduire la gratitude nécessite une volonté sincère de créer un environnement où les collaborateurs peuvent « être bien ».
La gratitude initie un cercle vertueux
La gratitude est une des couleurs de la palette des qualités que les entreprises gagneraient beaucoup à introduire. On peut évoquer aussi l’empathie, le pardon ou la compassion. La bonne nouvelle, c’est que ces qualités sont intrinsèquement en nous. Elles ne demandent qu’à être cultivées et à fleurir. Encore faut-il qu’elles trouvent un terrain où s’épanouir. La gratitude est peut-être la plus facile à introduire dans l’entreprise. Elle a meilleure presse que le pardon ou la compassion, jugés un peu « difficiles » et connotés. Elle est perçue comme plutôt facile à pratiquer, positive, presque ludique. Et, en exprimant de la gratitude à une autre personne, vous reconnaissez ses bonnes intentions et actions, ce qui est un premier pas vers l’empathie.
La gratitude peut « s’entraîner » très simplement, en s’accordant des temps de pleine conscience de tout ce qui est beau et bon dans notre vie. Et cela ouvre le cœur ! Elle facilite par exemple l’entrée dans des conversations délicates : exprimer à l’autre sa gratitude pour une chose très simple établit tout de suite une connexion.
Aussi, elle nourrit la gentillesse et le sens d’une responsabilité sociale. En prenant conscience de notre chance, nous développons des comportements plus altruistes. Cela se traduit, dans l’entreprise, par un désir d’aider les autres, l’envie de contribuer plus activement à des projets, un engagement plus vivant.
Et ressentir, puis exprimer sa gratitude, est un cadeau - qui comme les cadeaux en général, procure du plaisir à celui qui le reçoit, mais aussi un supplément de bien-être à celui qui l'offre. En formulant un merci, je fais du bien et je me fais du bien.
Cultivons la gratitude attitude !
Prudence toutefois : la gratitude n’est pas la nouvelle panacée pour guérir tous les maux de l’entreprise. Quels sont les écueils à éviter, et comment créer les meilleures conditions possibles ? A découvrir dans un prochain billet…
Anne-Valérie Rocourt
Méditer & Agir
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